Coucou,
c’est moi, Fleur. Pour faire connaissance, je vais vous
décrire mon quotidien.
Le
matin, je me réveille entre 5h30 et 6h30, et je crie car je n’aime pas rester
seule. Si mes parents tardent trop, je me tape : je ne peux pas m’en empêcher,
et puis ça les fait venir plus vite. Papa m’assied dans mon lit, me cale avec
des coussins et me donne des jouets pour me faire patienter. Parfois le weekend
mes parents me prennent dans leur lit, avec tout le bazar qui me nourrit la
nuit. J’aime bien être avec eux, ça me rassure, le bruit de la pompe nous berce
et tout le monde se rendort. En semaine, on a moins de temps, il faut vite
arrêter la pompe, passer mes médicaments par le tuyau qui va dans mon estomac,
c’est pratique, puis nettoyer ma cicatrice de stomie. Quand c’est jour de
crèche, Taxi-Laurent vient me chercher. J’aime beaucoup Laurent, j’ai confiance
quand il me porte. Il m’appelle « le pinson » parce que je babille
sans arrêt. Je dois parfois lui casser les oreilles, mais il me laisse faire. « Poupée »,
mon doudou, m’accompagne partout, je lui fais de gros câlins et je lui parle
beaucoup dans mon langage-Fleur.
A
la crèche je retrouve mon AMP (Assistante Médico-Psychologique) attitrée, ainsi
que mes copains handicapés ou non. Certains lundis je peux faire de la balnéo à
l’IME voisin, mais le bassin est souvent fermé car il est vieux et il n’y a pas
d’argent pour le réparer correctement (ces histoires de sous énervent beaucoup
Maman, elle dit que les enfants handicapés sont laissés-pour-compte). Mon AMP
me met dans mon verticalisateur pour me faire faire de la peinture ou plein d’autres
jeux. Puis j’ai droit à un repas bien mixé, car je n’arrive pas à avaler les
morceaux. Crème au chocolat en dessert, sinon je chipote ! Le vendredi,
mon orthophoniste vient faire une séance à la crèche, je l’aime bien mais je n’ai
pas toujours envie de jouer avec elle. Ensuite Xavier vient jouer de la musique
et chanter, j’adore cela et je l’applaudis bien fort.
Quand
je ne suis pas à la crèche, plein de gens viennent me faire travailler chaque
semaine à la maison : une psychomotricienne, une kiné, et encore une AMP
pour faire du verticalisateur. Je n’aime pas trop ça mais les docteurs
insistent… Ce que je préfère c’est le motilo : on me sangle dedans, et je
peux parcourir la maison ou la crèche à toute allure. Vous vous rendez compte,
je peux enfin me déplacer seule ! Maman m’emmène aussi chez un tas de
docteurs du CHU, chacun regarde juste une petite partie de ce qui cloche chez
moi, des fois je me demande à quoi ça sert. Une fois, nous avons dû partir du
service d’ophtalmo tellement l’infirmière et l’interne m’avaient fait mal et peur.
Pourtant je ne suis pas douillette : je ne me plains pas pendant les
piqûres de botox (j’suis une vraie star, moi !), et on peut changer mon
bouton de gastrostomie sans difficulté.
Le
soir, je mange un peu puis rebelote : pose du tuyau, passage des
médicaments. La mise en route de la nutrition je m’en fiche, moi je dors déjà.
Avec la gastrostomie mes parents ne m’embêtent plus autant pendant les repas,
et ils ont arrêté de mettre dans mes plats ce truc dégueu au nom bizarre :
maltodextrimachin. L’opération m’a fait très mal, mais maintenant que le trou
a cicatrisé, ça va. On va changer mon bouton tous
les six mois pendant quelques années, on ne sait pas combien, ça me fait une
sorte de gros piercing en plastique sur le ventre, c’est une mode à lancer
après tout.
Voilà,
c’est ça mon quotidien de petite fille extra-ordinaire. Evidemment je n’ai pas
écrit tout cela, je n’ai même pas les mots pour exprimer ce que je ressens, pourtant
je comprends beaucoup de choses... J'espère que maintenant c'est vous qui me comprendrez mieux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire